Multiples opérations d'augmentation de capital: les motifs réels!


Ces opérations sont devenues très récurrentes dans le milieu des affaires. Il ne se passe une journée sans qu’il ne soit publié dans le journal d’annonces légales, les mutations opérées dans plusieurs entreprises exerçant en Côte d’Ivoire. Parmi celles-ci figurent en bonne place, les opérations d’augmentation de capital des sociétés. L’on est tenté de s’interroger si toutes ces mutations sont réellement conformes et autorisées par la loi. Aussi, convient-il de découvrir les différents modes opératoires utilisés lors de la réalisation de ces montages juridiques et financiers. Sans toute fois oublier de déceler les motivations réelles qui sous-tendent cette effervescence parmi les associés de ces entreprises.

La légalité de l’augmentation de capital

Lorsque des associés se mettent ensemble pour créer une société, ils réunissent une certaine somme d’argent en faisant, chacun, des apports. L’ensemble de ces apports, qui permettra le démarrage de l’activité de cette entreprise constitue le capital de la société. Pour les entreprises constituées sous la forme juridique de Société à Responsabilité Limitée (SARL) un capital minimum d’un million de FCFA est exigé au départ. Au niveau des Sociétés Anonymes (SA), obligation est faite aux fondateurs de mobiliser au moins un capital d’une valeur de dix millions de FCFA. Certains pourraient s’interroger sur les textes de loi qui fondent les opérations d’augmentation de capital.
A cet effet, il y a lieu de retenir que l’acte uniforme OHADA relatif aux sociétés et groupement d’intérêt économiques stipule en son article 67 que : « Le capital social est fixe. Toutefois, il peut-être augmenté ou réduit, pour chaque forme de société, dans les conditions prévues par le présent Acte uniforme, pour la modification des statuts. ».
Aussi, concernant ces publications très récurrentes dans le journal des annonces légales, ces textes de l’OHADA précisent en l’article 263 que : « Si l’une des mentions de l’avis prévu à l’article 262 du présent Acte uniforme est frappée caducité par suite de la modification des statuts ou de tous actes, de toutes délibérations ou de toutes décisions des assemblées de la société ou de ses organes, la modification est publiée par avis inséré dans un journal habilité à recevoir les annonces légales dans l’Etat partie du siège social… »
Ainsi donc, la loi oblige toutes les entreprises qui modifient leurs statuts, notamment le montant de leur capital social, à publier cette information dans le journal des annonces légales, en y précisant toutes les nouvelles caractéristiques de la société.

Les méthodes d’augmentation de capital

Le mécanisme d’augmentation de capital peut se faire au moyen de quatre principales techniques, dont la première est l’augmentation par apport en numéraire. Dans ce cas, l’entreprise émet de nouvelles actions et les cède à des souscripteurs en contre partie d’un paiement en espèces. Au niveau des écritures comptables de la société, cette opération affecte donc à la fois les capitaux propres (augmentation de capital) et les disponibilités (apport en numéraire). Cependant, le prix d’émission auquel les titres sont cédés peut différer de la valeur nominale (le pair) des actions, on dira donc alors que celles-ci sont assorties d’une prime d’émission.
L’augmentation de capital peut également s’opérer en contrepartie d’un apport en nature au lieu d’un apport en monnaie. Cet apport en nature peut porter sur des immobilisations corporelles (terrains, immeubles, installations techniques, etc), sur des immobilisations incorporelles (fond de commerce, brevet,…), sur des immobilisations financières (titres participatifs) ou encore sur plusieurs autres actifs. L’avantage de cette technique est qu’elle permet à l’entreprise de réaliser des investissements sans faire de décaissements, mais plutôt elle rémunère l’apporteur de ces actifs par la création et la remise d’actions nouvelles. C’est ce montage financier qui est utilisé quand les entreprises procèdent à des fusions et acquisitions.
La troisième forme d’augmentation de capital est celle qui est effectuée par la conversion de dette. Une entreprise fortement endettée peut procéder par cette voie pour alléger le passif de son bilan. Cela lui permettra d’échapper à la contrainte de remboursement d’une partie de ses dettes. Le nouvel associé, qui se trouve être le créancier d’alors de cette entreprise endettée, renoncera donc à cette créance, qui sera convertie en actions dont il sera l’acquéreur. Il participera donc désormais aux risques d’investissement que prendra cette société.
L’autre moyen utilisé également pour accroître le capital d’une société est l’incorporation de réserves. En fin d’exercice, une entreprise ayant dégagé un gros bénéfice, peut décider de renflouer ses capitaux propres en augmentant ses réserves. Elle peut aussi puiser dans ses réserves devenues suffisantes, créer de nouvelles actions, et les attribuer gratuitement à ses actionnaires, en faisant une ponction sur ses réserves. Cette incorporation des réserves assurera pour l’exercice prochain une rémunération accrue des actionnaires en cas de distribution de dividendes par leur société.

Les motivations réelles

Cette recrudescence des communiqués dans la presse écrite, rappelant à chaque fois les modifications s’étant opérés au niveau des capitaux propres de certaines sociétés, donne lieu de réfléchir sur les motifs réels de nos associés. En clair quel est l’objectif que ces dirigeants d’entreprises visent, lorsqu’ils procèdent à tous ces montages juridico-financiers.
A la vérité, la raison est toute simple. Dans la majeure partie des cas, une entreprise procède à l’augmentation de ses capitaux dont le souci d’accroître ses investissements. Lorsqu’une société démarre ses activités avec par exemple un capital de dix millions de FCFA, elle peut après plusieurs années de fonctionnement éprouver le besoin d’étendre ses activités dans un souci d’accroître sa rentabilité. Pour se faire, elle devra donc réaliser de nouveaux investissements. Mais quelles peuvent être les sources de financement de ces investissements ?
Au moins trois sources peuvent être identifiées dans l’immédiat. A savoir, l’emprunt, la capacité d’autofinancement, et l’augmentation de capital. Si l’assemblée générale de la société refuse de recourir aux deux premières cités, sous prétexte que les investissements à réaliser sont énormes et que l’entreprise ne doit plus encore s’encombrer de charges financières telles que les intérêts d’emprunt, elle peut décider d’ouvrir son capital à d’autres investisseurs. Notons également que la conquête de certains marchés et l’exercice de certaines activités nécessitent aussi que l’entreprise soit dotée d’une forme juridique particulière.
Par exemple, pour se constituer en institution bancaire, il faut avoir obligatoirement la forme juridique de société anonyme. La banque centrale, organe de régulation du système bancaire, arrive même quelques fois quand elle le juge nécessaire, à imposer aux banques, un niveau de capital minimal, assorti d’un délai auquel toutes les institutions bancaires doivent scrupuleusement se conformer sous peine de disparaître.
De cette même façon certains opérateurs économiques sont très sélectifs dans la passation de marchés et le développement de leurs affaires. Ces derniers peuvent exiger que l’entreprise voulant nouer des relations d’affaires avec eux soit au préalable constituées sous une forme juridique particulière afin qu’ils aient une certaine assurance. Celle-ci se voit donc dans l’obligation de modifier son statut juridique, donc d’augmenter son capital en cours d’exercice, si elle tient à compter cet opérateur économique au nombre de ses partenaires privilégiés. En de telles circonstances, l’augmentation de capital permet ainsi aux entreprises d’accroître leur notoriété et leur crédibilité tout en de facilitant par la même occasion le développement de la mise en relation d’affaires.
L’un des éléments qu’il convient de ne pas perdre de vue aussi, est que l’ors de l’analyse d’un dossier de demande de crédit dans une banque, l’analyste crédit peut compter le capital social de la société comme l’un des éléments fondamentaux pouvant lui permettre d’apprécier la solidité financière de l’entreprise.
Il revient aussi souvent que certains associés suscitent en assemblée générale, des décisions d’augmentation de capital, dans le but secret d’accroître leur pouvoir de décision au sein de l’entreprise. Ils saisissent donc toute opportunité de recapitalisation pour introduire certains de leurs proches dans le capital de la société, afin d’influencer plus facilement toutes les orientations et décisions importantes que l’entreprise aura à prendre.

LOH DAMAS
Cel: +225 02 73 40 37
E-mail: lohdamas@yahoo.fr

Commentaires